Maxence Martin, Martín Alcalá Pajares, Miguel Montoro Girona (à l'écran), Robert Schneider (à l'écran), Jean-Claude Ruel et Annie DesRochers
On utilise des coupes partielles dans les forêts de pin gris sur esker pour éviter de faire trop de coupes totales. Cela permet de réduire les effets négatifs de l’aménagement forestier sur les milieux naturels, notamment sur l’eau souterraine et sur la biodiversité. Toutefois, on connaît encore mal leurs effets sur la croissance des arbres qui restent en place et sur la mortalité par chablis (vent) après la coupe, ce qui soulève des questions sur la durabilité à long terme de ces interventions.
Dans le cadre de ses travaux au doctorat en foresterie et en gestion des écosystèmes à l’Institut de recherche sur les forêts (IRF), Martín Alcalá Pajares a cherché à mieux comprendre comment les coupes partielles influencent la croissance des arbres, la mortalité liée au chablis et la dynamique du carbone aérien, c’est-à-dire le carbone stocké dans les parties aériennes des arbres. Il a étudié des peuplements dominés par le pin gris (Pinus banksiana) établis sur des eskers au Québec. Le doctorant a d’abord comparé, huit ans après la récolte, deux traitements sylvicoles, soient l’éclaircie (30 à 35 % de prélèvement) et la coupe d’ensemencement (40 à 50 % de prélèvement), ainsi qu’un témoin (0 %). Chaque traitement a été répété huit fois, pour un total de 24 sites d’étude. Par la suite, un second dispositif a permis d’examiner le rôle des greffes racinaires dans la mortalité par chablis dans les bandes riveraines résiduelles.
Les analyses dendrochronologiques (cernes annuels) et isotopiques (carbone) ont montré qu’après traitements, les arbres ont modifié la façon dont ils utilisent le carbone, notamment en le redirigeant vers leurs racines. Ce ralentissement initial de la croissance radiale était plus marqué près des chemins de débardage et dans les peuplements où les prélèvements étaient plus élevés, mais la croissance s’est améliorée après environ huit ans. Ces résultats suggèrent que les arbres ajustent leur croissance pour s’adapter aux nouvelles conditions du milieu. L’étude a également montré que les stocks de carbone dans les arbres vivants du traitement de moindre intensité étaient similaires à ceux des forêts non exploitées, puis que ceux dans le bois mort étaient plus faibles dans tous les traitements de coupe partielle par rapport à ceux des témoins en raison d'une réduction des chicots (arbres morts). Cela montre qu'un traitement modéré et la préservation des chicots pourraient contribuer à maintenir les stocks de carbone après la coupe. Par ailleurs, les greffes racinaires semblent renforcer l’ancrage des arbres, réduisant leur risque de déracinement, mais augmentant la probabilité de rupture du tronc lors de vents forts.
Cette thèse permet ainsi de mieux comprendre les impacts physiologiques et structurels des coupes partielles et soutient l’adaptation de ces interventions aux conditions particulières des forêts boréales établies sur des sols d’esker, reconnus pour leur sensibilité.
C’est le 15 décembre dernier que Martín Alcalá Pajares a soutenu sa thèse au campus de l’UQAT à Amos. Avec pour titre « Growth, thinning shock, carbon sequestration, and mortality following partial cuts in esker forests », ses travaux ont été dirigés par Annie DesRochers, professeure à l’IRF et codirigés par Miguel Montoro Girona, professeur associé à l’IRF.
Soulignons que les résultats de ces travaux ont été publiés dans les revues spécialisées Trees et Forest Ecology and Management.